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Primaliance

Pourquoi les SCPI se revalorisent en début d'année ?

Au 1er semestre 2022, une vingtaine de SCPI du marché ont revalorisé leur prix de parts, au moment même où les marchés financiers subissaient une forte correction en raison du déclenchement de la guerre en Ukraine. Cette situation paradoxale montre la décorrélation qui existe fondamentalement entre le « placement pierre » et les principaux supports d’épargne financière. Le premier joue sur le temps long, avec un phénomène d’amortissement de la volatilité de court terme, alors que les seconds sont bien souvent tributaires de la psychologie collective des intervenants de marché, versatile par nature. 

Le phénomène observé au 1er semestre 2022 pourrait à nouveau se produire en début d’année 2023 : alors que la conjoncture macro-économique est toujours aussi incertaine, les SCPI finissent l’année 2022 avec des niveaux de distribution stables, voire dans un certain nombre de cas en hausse substantielle, par rapport à 2021. Les sociétés de gestion n’ont jamais autant collecté sur ce type de supports, le précédent record de 2019 (8,6 milliards d'euros de collecte nette) étant en passe d’être battu cette année. Les gérants de SCPI pourraient ainsi être tentés de revaloriser leurs prix de parts en début d’année 2023, et ce pour plusieurs bonnes raisons.

Une collecte record en 2022 avec des prix de parts souvent décotés par rapport à la valeur de reconstitution des SCPI à fin 2021

L’année 2022 restera probablement dans les annales comme celle du record historique de collecte sur les SCPI, avec d’ores et déjà 7,5 milliards d'euros collectés sur les 9 premiers mois de l’année, en hausse de 45% par rapport à la période équivalente de 2021 (source : ASPIM). Les 8,6 milliards d'euros de collecte de 2019, record historique actuel, devrait donc être dépassé en toute logique cette année.

Dans le même temps, les valeurs de patrimoine des SCPI se sont considérablement appréciées ces dernières années, générant de facto un certain effet retard sur les prix de parts, malgré des revalorisations assez fréquentes depuis 3 ou 4 ans. Un bon nombre de SCPI accusent ainsi une décote de plusieurs centaines de points de base par rapport à leurs valeurs de reconstitution validées lors des dernières assemblées générales annuelles en juin et juillet dernier, établies sur la base des valeurs d’expertises des patrimoines à fin 2021.

Les sociétés de gestion ont donc dans un certain nombre de cas « subi » une collecte importante sur des niveaux de prix de parts potentiellement dilutifs pour les associés historiques des véhicules concernés, les délais de jouissance généralement compris entre 3 et 6 mois ayant fort heureusement permis de gommer ces effets sur la plupart des véhicules. Malgré tout, le fait d’avoir des valeurs de parts trop décotées (la décote restant obligatoirement dans la limite réglementaire des 10%) est une situation inconfortable en période de forte collecte, ce qui pourrait conduire certaines sociétés de gestion à revaloriser les prix de souscription de leurs SCPI en début d’année prochaine, même si les valeurs d’expertise à fin 2022 stagnent ou régressent légèrement.

 Ce type de décisions ne seront pas prises par les gérants avant d’avoir une vision claire sur les expertises à fin 2022, c'est-à-dire à priori plutôt en milieu ou fin de premier trimestre 2023. Pour avoir une idée du processus, la majorité des revalorisations de SCPI en 2022 ont eu lieu entre début mars et début mai.

Les expertises à fin 2022 portées par la dynamique locative malgré la hausse des taux de marché

On parle aujourd’hui beaucoup d’une correction à la baisse des prix immobiliers, ce qui peut effectivement être observé sur les foncières cotées depuis plusieurs mois. En effet, la forte hausse des taux d’intérêt qui a eu lieu depuis le début de l’année a nécessairement un impact sur les exigences de rendement immobilier qu’ont les investisseurs, en particulier ceux qui investissent avec de l’effet de levier et qui subissent de plein fouet la hausse des coûts d’emprunt. Mais il faut parallèlement garder à l’esprit que cette « décompression des taux de rendement immobiliers » est compensée par un autre effet qui joue exactement dans le sens opposé : la dynamique des indexations de loyers. Les experts ont par exemple observé sur l’immobilier logistique européen une hausse de plus de 12% des loyers sur 12 mois glissants au 1er semestre 2022 (source : BNP Paribas Real Estate, sur un panel de 21 pays comprenant 48 marchés). 

Ainsi, pour un rendement instantané demandé de 4% en 2021 sur cette typologie d’immobilier, la hausse des loyers dont a bénéficié l’acheteur depuis un an lui permet d’amortir une décompression de rendement de 50 points de base environ (soit 12% de 4%) sans impact sur le prix de son actif. Tous les secteurs immobiliers n’ont bien entendu pas la même dynamique de rentabilité locative que la logistique, mais certains actifs comme par exemple les commerces ou l’hôtellerie bénéficient d’un fort effet de rattrapage sur leurs loyers depuis 2021, car les bailleurs sortent progressivement des périodes de franchises accordées aux locataires au moment de la pandémie de covid-19.

Sur les SCPI bien gérées, il peut ainsi y avoir des revalorisations d’expertises sur des biens spécifiques qui retrouvent un régime de croisière locatif post-covid. On doit donc s’attendre pour une proportion non négligeable de véhicules à une stabilité, voire à une légère hausse des valeurs d’expertises à fin 2022, malgré la décompression générale des rendements immobiliers observée dans le marché.

Les SCPI les mieux à même d’entrer dans cette catégorie (stabilité ou légère hausse des valeurs d’expertises) sont bien souvent celles qui auront connu les meilleures progressions de loyers en 2022. Or selon l’ASPIM, les acomptes de dividendes versés par les SCPI sur les trois premiers trimestres de 2022 sont en hausse de + 3,5 % par rapport à la même période de 2021 (en moyenne pondérée de la capitalisation), car les taux d’encaissement des loyers se sont substantiellement améliorés en sortie de pandémie. Cela signifie que sur certains véhicules, la hausse de distribution par rapport à 2021 approche -voire dépasse- les 10%…

Les sociétés de gestion veulent renforcer l’attractivité des véhicules qu’elles gèrent

C’est un autre argument de taille qui milite pour un mouvement de revalorisations sélectives de certaines SCPI début 2023. Les sociétés de gestion travaillent leur attractivité auprès des épargnants en faisant -quand c’est possible- progresser le rendement global de leurs véhicules par le biais des revalorisations de prix de parts. En effet, les investisseurs sont certes sensibles au dividende distribué, qui constitue l’essentiel de la performance sur les SCPI de rendement, mais ils s’intéressent aussi à la plus-value qu’ils peuvent espérer réaliser sur leur placement. La progression des prix de parts représente en moyenne 18% de la performance globale des SCPI sur les 10 dernières années, avec 82% de celle-ci qui est à l’inverse issue de la distribution de dividendes. L’intérêt de booster la performance globale par le biais d’une revalorisation de prix de part a aussi une dimension fiscale : avec des frais d’entrée de l’ordre de 10%, l’associé d’une SCPI ne réalise pas de plus-value comptable sur ses parts avant que celles-ci aient au moins progressé de 10%. Dit autrement, cela signifie que les 10 premiers points de revalorisation se font en franchise de fiscalité.

Au début de l’année prochaine, alors que certains véhicules connaîtront des baisses de valeurs d’expertises liées aux décompressions des rendements immobiliers, les sociétés de gestion bénéficiant à l’inverse d’une dynamique favorable sur les valeurs de leurs actifs seront tentées de pousser leur avantage commercial en extériorisant des revalorisations de prix de parts que leurs concurrents ne pourront pas se permettre de mettre en œuvre. Les SCPI ayant de surcroit les retards accumulés les plus importants par rapport à leur valeur de reconstitution (proche de la limite réglementaire de 10%) seront à surveiller tout particulièrement pour un éventuel positionnement à l’achat fin 2022 ou début 2023, dans l’optique de bénéficier d’une potentielle revalorisation de leurs prix de part.

Publie le 05 décembre 2022
8 mins de lecture
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