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Label ISR pour les fonds immobiliers : quel bilan après quelques mois ?

Le 23 octobre 2020, après un long processus de maturation à l’initiative de l’ASPIM (Association Française des Sociétés de Placement Immobilier), le label ISR a été étendu aux fonds immobiliers : SCPI, OPCI, SCI. Créé et soutenu par le Ministère des Finances, ce label permet de sélectionner des placements responsables et durables, conciliant performance économique et réduction de l’impact social et environnemental. 8 SCPI et 2 OPCI Grand Public ont d’ores et déjà obtenu le label ISR à fin mai 2021. Quel bilan peut-on en tirer aujourd’hui ?

 

Le label ISR est décerné aux fonds éligibles pour une période de 3 ans renouvelable, sur la base d’un cahier des charges précis, puis il est amené à être contrôlé par le biais d’un audit annuel réalisé par deux organismes accrédités par le COFRAC (organisme parapublic qui s’assure de la qualité des labellisateurs) : Afnor Certification et EY France. En cas de non respect des critères préalablement définis, les fonds labellisés peuvent potentiellement perdre leur label.

7 mois après le lancement du label ISR immobilier, quel bilan peut-on en tirer ?

Un intérêt marqué pour l’obtention du label ISR

Tout d’abord, force est de constater que de nombreuses sociétés de gestion ont -dès la création du label- compris l’intérêt de se positionner sur cette nouvelle référence ESG (Environnementale, Sociale et de Gouvernance). Le faible nombre de véhicules déjà labellisés n’étant que la partie émergée de l’iceberg, puisqu’une foule de candidats sont aujourd’hui en attente d’agrément ISR.

Le besoin de labellisation éthique est donc clairement présent pour les fonds immobiliers, que ce soit pour satisfaire la demande des investisseurs qui sont habitués depuis longtemps à tenir compte de critères ESG pour leurs placements financiers (particuliers comme institutionnels), mais également pour lutter contre une forme d’obsolescence programmée des actifs immobiliers, qui à terme se traduit par une destruction de valeur pour leurs détenteurs.

L’immobilier est certes une affaire de sélectivité à l’achat (bons emplacements, immeubles de qualité correspondant à la demande des usagers), mais de façon tout aussi importante un engagement pour les propriétaires à effectuer l’entretien nécessaire à la conservation de leur patrimoine. Faire progresser un actif immobilier dans sa « notation ESG » fait désormais partie de l’entretien et de la mise à niveau nécessaire pour éviter sa dévalorisation au cours du temps.

Un positionnement spécifique de l’immobilier par rapport aux actifs financiers

Par rapport aux actifs financiers, la gestion immobilière comporte des facteurs spécifiques : faible liquidité des actifs, lenteur de renouvellement du patrimoine, possibilité d’agir directement sur les actifs par le biais des travaux d’entretien ou de réparation… Il était donc nécessaire que le label ISR immobilier tienne compte de ces aspects. En particulier, les stratégies d’exclusion très répandues dans la gestion financière doivent être manipulées avec prudence dans la gestion immobilière. Il est en effet compliqué de se débarrasser d’un immeuble rapidement, en particulier si sa note ESG est trop basse par rapport à la norme du marché (il peut dans certains cas être invendable). D’autre part, la possibilité de faire évoluer un tel immeuble par le biais de travaux de rénovation énergétique peut souvent lui permettre un repositionnement salutaire en terme de note ESG. In fine, ce sera plutôt sur le front de la gestion locative que de telles stratégies d’éviction pourront être employées, en refusant par exemple de louer les bâtiments à des sociétés dont l’activité est liée aux énergies fossiles, au nucléaire, au tabac, à l’alcool…

Compte tenu de l’inertie du patrimoine immobilier détenu par les fonds, l’enjeu prioritaire du label ISR sera donc de faire progresser l’existant en travaillant sur la structure physique des actifs eux-mêmes et sur le comportement des occupants (en particulier le respect des règles d’usage des fluides et des énergies). C’est l’approche « best-in-progress » qui est adoptée par 83% des fonds immobiliers labellisés ISR. En complément, l’approche de sélectivité dite « best-in-class », tend à sélectionner à l’achat des actifs de note ESG élevée, avec un objectif de maintien de la note au-dessus du seuil fixé à l’achat. Cette stratégie sera plus adaptée pour des fonds récents qui ne portent pas le poids majoritaire d’un patrimoine existant, mais certains d’entre eux n’hésitent pas malgré tout à aller chercher des actifs à faible note ESG dotés d’un potentiel de progression important. Il faut en effet garder à l’esprit que l’amélioration d’un bâtiment ancien a la plupart du temps un meilleur bilan carbone que la construction d’un bâtiment neuf.

Des réglementations sur le label ISR évolutives

Le label ISR est une étape plus qu’un aboutissement, tant les réglementations nationales et européennes sont évolutives.

En particulier, un travail important doit encore être effectué sur la fiabilité des données qui alimentent les notations ESG des actifs, avec une recherche de référentiel commun entre les différentes sociétés de gestion. Cet aspect est probablement l’un des plus complexes pour la gestion immobilière car les données nécessaires ne sont pas aussi facilement disponibles que dans le cadre des instruments financiers cotés : les fournisseurs de données peuvent être les propriétaires des immeubles, les locataires, les exploitants, les fournisseurs… et il n’y a pas de convention ou de format unique de présentation des chiffres !

Création d’un Observatoire du label ISR des fonds immobiliers

C’est dans cet esprit d’amélioration permanente qu’un Observatoire du label ISR des fonds immobiliers doté d’un Comité de suivi a été créé par l’ASPIM et l’OID (Observatoire de l’Immobilier Durable) en partenariat avec Novethic. L’idée est de dresser un bilan annuel sur l’ensemble des fonds labellisés -une première synthèse vient d’être publiée moins d’un an après la création du label-, de comparer les grilles ESG des sociétés de gestion par la conduite d’entretiens détaillés avec chacune d’entre elles, et d’anticiper les évolutions réglementaires ou de certification qui pourraient avoir un impact sur le label ISR. Ce dernier point a récemment pris une nouvelle dimension en raison des exigences de fiabilisation des données, imposées par la Doctrine 2020-03 de l’AMF pour les fonds grand public qui souhaitent communiquer sur un engagement en matière de performance extra-financière.

Bilan du premier Observatoire du label ISR des fonds immobiliers

Dans cette première publication de l’Observatoire du label ISR des fonds immobiliers, le Comité de suivi a détaillé les « 3 piliers » de la notation ESG adoptée par les sociétés de gestion :

- le premier pilier E (Environnement) représente 45% de la note en moyenne sur l’ensemble des fonds labellisés,

- le second pilier S (Social) pour 34%,

- le troisième pilier G (critères de gouvernance), compte pour  21% de la note.

Les grilles adoptées sont propres à chaque fonds immobilier, les critères retenus ainsi que leurs pondérations pouvant considérablement varier d’un véhicule à l’autre, en fonction des secteurs (commerce, bureau, hôtel, logistique, résidentiel…), l’âge des immeubles, et les stratégies de gestion.

Certaines grilles ESG reposent sur une quinzaine de critères seulement, alors que d’autres en comportent plus d’une centaine (il y a 55 critères en moyenne sur l’ensemble des véhicules labellisés).

Le Label ISR prévoit que les sociétés de gestion publient dans les rapports annuels des fonds concernés un minimum de 8 « indicateurs d’impact » qui permettent de mesurer concrètement le travail effectué par les gérants pour améliorer la notation ESG de leur patrimoine. Quatre indicateurs parmi ces 8 sont imposés (Energie, émissions de Gaz à Effet de Serre, gestion de la chaîne d’approvisionnement, et mobilité ou santé et confort des occupants), les quatre autres indicateurs étant choisis par les sociétés de gestion, sous réserve qu’ils couvrent les trois piliers E, S et G.

L’Observatoire du label ISR des fonds immobiliers précise dans sa première publication qu’ « au 31 décembre 2020, le secteur de l’immobilier d’inves­tissement comptait 12 fonds immobiliers labellisés ISR, détenus par huit sociétés de gestion. La valeur totale des fonds labellisés était de 10,9 milliards €, soit 6 % du marché global des FIA immobiliers. La capitalisation est répartie de manière inégale entre les fonds, dont trois représentent 75 % de la capitalisation totale.

La majorité des fonds immobiliers labellisés ISR ont été créés avant 2020, et plus de 40 % avant 2015, témoignant de l’applicabilité du référentiel aux fonds existants. Le nombre d’actifs constituant les fonds peut dépasser les 200 unités, pour une surface moyenne d’environ 7 500 m². La plupart des fonds possèdent plusieurs typologies d’actifs, parmi lesquelles le bureau, à hauteur de 80 %, le commerce, le résidentiel, l’hôtellerie et les services à la personne. Seul 25 % des fonds investissent exclusivement en France. »

A aujourd’hui, 8 SCPI sont labellisées ISR :

  • LF Grand Paris Patrimoine (groupe La Française)
  • Fair Invest (Norma Capital)
  • Neo (Novaxia)
  • PFO2 (Perial AM)
  • Primopierre (Primonial REIM)
  • Pierre Capitale (SwissLife AM)
  • Iroko Zen (Iroko)
  • Epargne Pierre (Atland Voisin)

En complément de ces 8 SCPI, 2 OPCI Grand Public sont labellisés ISR :

  • Preim ISR (Primonial REIM)
  • BNP Paribas Diversipierre

Les autres véhicules labellisés sont des SCI éligibles à l’assurance-vie ou des fonds institutionnels.

Publie le 27 mai 2021
8 mins de lecture
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