Conversion de bureaux en logements : quel potentiel ?
Le spécialiste international de l’immobilier d’entreprise Knight Frank s’est penché sur une problématique récurrente dans les grandes métropoles européennes : les activités tertiaires à forte valeur ajoutée qui y sont exercées consomment du foncier et tendent à évincer en partie les habitants de certains quartiers en « préemptant » des mètres carrés immobiliers à des prix élevés. Parallèlement à cela, des surfaces de bureaux obsolètes s’accumulent sans trouver preneurs car les exigences des utilisateurs tertiaires les conduisent souvent à privilégier des locaux neufs ou restructurés selon les dernières normes d’usage. La question qui se pose alors est la suivante : y a-t-il aujourd’hui un potentiel de transformation massive de bureaux en logements pour équilibrer l’offre et la demande ?
Pendant l’épidémie de Covid-19 s’est ajoutée une nouvelle dimension à la problématique « bureaux contre logements » avec le développement du télétravail et l’accélération de la digitalisation des activités. Ces tendances semblent s’inscrire dans la durée et induisent une modification des organisations des entreprises, et donc de la façon dont elles occupent les mètres carrés de bureaux : le flex office pourrait ainsi devenir la norme pour un grand nombre d’utilisateurs tertiaires, accélérant potentiellement l’obsolescence de certains actifs. La pandémie a également eu un impact sur les mobilités, stimulant les modes de déplacement individuels au détriment des transports en commun. Les salariés ont à cette occasion exprimé le besoin d’habiter à proximité de leur lieu de travail, ce qui est parfois compliqué en raison de la pénurie actuelle de logements dans certains quartiers en zones tendues.
Premier marché immobilier tertiaire d’Europe continentale avec 55 millions de mètres carrés de bureaux, l’Île-de-France est un véritable laboratoire de la transformation de bureaux en logements. Knight Frank a analysé en détails sur cette grande région à l’urbanisme hétérogène le potentiel de reconversion des actifs tertiaires en unités résidentielles. L’étude réalisée se focalise sur environ soixante communes franciliennes disposant d’un parc immobilier tertiaire de plus de 150.000 m2, et utilise 15 indicateurs chiffrés permettant d’évaluer pour chacune de ces zones la transformabilité des immeubles de bureaux en logements.
Un premier résultat intéressant de l’étude de Knight Frank montre que la seconde couronne est particulièrement concernée par les surfaces de bureaux vides depuis plus de quatre ans (48% de l’offre immédiate, contre 33% en moyenne sur l’ensemble de la région Île-de-France), signe clair d’obsolescence des actifs concernés. Dans certaines communes à la démographie dynamique comme Cergy, Saint-Quentin-en-Yvelines ou Saint-Germain-en-Laye, les conditions de marché sont ainsi très favorables à la transformation de bureaux en logements. En première couronne également se situent des gisements de reconversion immobilière, en particulier dans les secteurs qui seront raccordés par le réseau de transport du Grand Paris Express. A Paris en revanche, le potentiel semble plus limité pour une massification des opérations de transformation : « le dynamisme des commercialisations de bureaux à Paris, le niveau élevé des valeurs vénales et locatives – notamment dans le QCA qui affiche un différentiel de loyer de près de 300 €/m² en faveur des bureaux –, des disponibilités assez faibles, le tassement des prix des logements et la baisse de la population témoignent d’un contexte de marché moins favorable qu’ailleurs à une accélération des transformations », analyse Vincent Bollaert, le CEO France de Knight Frank.