AEW estime que les entrepôts logistiques et les centres commerciaux « prime » devraient surperformer les autres actifs immobiliers dans les prochaines années
Le gestionnaire AEW a récemment publié sa dernière étude (Perspectives Annuelles) sur les grandes tendances du marché immobilier. La conjoncture macro-économique a en effet radicalement changé depuis un peu plus d’un an avec le retour de l’inflation et un resserrement monétaire généralisé de la part des grandes banques centrales, générant des impacts significatifs sur la classe d’actifs immobilière. Dans ce nouveau contexte, AEW estime que l’immobilier logistique et les centres commerciaux « prime » devraient être en capacité de procurer les meilleurs rendements globaux aux investisseurs sur la période 2023-2027, tandis que sur le plan de la croissance des loyers, ce sont les actifs résidentiels et logistiques qui présentent la meilleure résilience.
Une minorité de marchés immobiliers européens seront en capacité de rémunérer leur risque
Un des principaux enseignements de l’étude d’AEW est qu’il faudra faire preuve d’une grande sélectivité pour investir dans l’immobilier à partir de 2023 : en effet, 5 marchés seulement sur 168 englobés par l’étude sont perçus comme attractifs en termes de ratios risque / rendement, 47 sont considérés comme neutres et 116 ne rémunèrent pas suffisamment leur risque. «Cela signifie que les investisseurs peuvent espérer atteindre le rendement exigé pour être compensés des risques associés à ces investissements dans seulement 30 % des marchés immobiliers couverts», analyse la société de gestion. Les 5 meilleurs marchés sont la logistique urbaine à Paris, la logistique à Berlin et Zurich et les centres commerciaux « prime » à Londres et Stockholm. En France, deux typologies d’investissements sont considérés comme « neutres » selon le critère du ratio risque/rendement : le marché résidentiel en Île-de-France et la logistique en région lyonnaise. L’ensemble des autres marchés français sont estimés être moins attractifs.
Un déficit de financement prévisionnel important sur les 3 prochaines années pour les acteurs endettés
Alors qu’AEW anticipe une baisse des volumes d’investissements sur l’immobilier d’entreprise européen en 2022 (à environ 260 milliards €, contre un record de 350 milliards € en 2021), le sujet du refinancement des acteurs immobiliers endettés se pose avec la hausse des coûts d’emprunt observée depuis un an. Le gestionnaire anticipe un déficit de financement de 24 milliards € sur les 3 prochaines années pour les trois principaux marchés européens : Royaume-Uni, Allemagne et France. Les baisses de valeurs des actifs et la plus grande frilosité des créanciers vont nécessairement conduire à une baisse des ratios LTV (Loan to Value) exigés. «Pour la France uniquement, ce déficit de financement est évalué à 5 milliards €. Comme après la crise financière mondiale, cela représente une opportunité d’investissement pour les investisseurs en fonds propres ou en dette disposant de capitaux prêts à être déployés», explique AEW dans son étude.
Les meilleurs rendements sont attendus sur l’immobilier logistique
Malgré ces vents contraires liés à la hausse des taux d’intérêt, l’immobilier va rester une classe d’actifs procurant des rendements très significatifs sur la période 2023-2027 : AEW estime en effet que les rendements globaux « prime » en Europe atteindront 4% par an sur la période 2023-2027. «Les prévisions des rendements globaux moyens sur l’ensemble de nos 196 marchés ont été revues à la baisse en raison de la décompression attendue des taux de rendement pour atteindre 4 % par an contre 5,8 % par an l’an passé. Cela est dû à la récente augmentation des taux souverains qui poussent à la hausse les taux immobiliers, limitant ainsi la croissance en capital», résume ainsi le gestionnaire d’actifs dans son étude récente.
La moyenne de 4% de rendement pour l’immobilier tertiaire recouvre en réalité des situations contrastées selon les typologies d’immobilier considérées : le secteur logistique serait ainsi selon AEW le plus performant avec un rendement annuel estimé de 5,4% sur les 5 prochaines années, la croissance des loyers venant compenser la hausse des taux de rendement instantanés exigés par les investisseurs. Les centres commerciaux « prime » viendraient en 2ème position avec des rendements globaux anticipés à 5,1 % par an sur 2023-2027, aidés par des taux de rendement locatifs initiaux élevés suite à la correction des valorisations due au Covid-19. AEW pense que les centres commerciaux conserveront des rendements locatifs relativement stables (et les plus élevés parmi les différents marchés immobiliers) au cours des cinq prochaines années.
En termes de croissance des loyers, ce sont les actifs résidentiels et la logistique qui profiteront des plus fortes dynamiques, en raison d’une pénurie structurelle d’offre. «L’augmentation du coût de la dette et des coûts de construction, ainsi que les réglementations environnementales limitent davantage l’offre neuve, protégeant ainsi la plupart des marchés de l’impact d’un ralentissement économique qui conduirait à une baisse de la demande», analyse AEW.
Concernant les marchés de bureaux, la bonne nouvelle est qu’AEW a revu à la baisse l’impact potentiellement négatif du développement du télétravail sur les demandes de surfaces par les utilisateurs. Le gestionnaire immobilier estime désormais que la hausse du télétravail sera limitée à 8% par rapport aux niveaux pré-pandémie, ce qui est largement absorbé par la croissance de l’emploi tertiaire anticipée entre 2022 et 2026, en particulier sur des métropoles comme Londres, Amsterdam et La Haye.
Irène Fossé, directrice recherche & stratégie Europe chez AEW, résume : «Sans surprise, la logistique demeure le secteur le plus attractif en raison de la croissance locative attendue, et ce malgré l’augmentation significative des taux de rendement, plus élevée que pour les autres typologies. Le résidentiel devrait également bénéficier d’un rendement locatif élevé au cours des prochaines années. Les centres commerciaux « prime » restent attractifs en termes de rendements globaux. Quant à l’impact du télétravail sur le secteur des bureaux, il semble être moins important que prévu. Ce qui est certain, c’est que l’offre neuve pâtit de l’augmentation des coûts de financement et des coûts de construction dans tous les secteurs. Nous nous attendons à ce que ces contraintes sur l’offre future viennent contrebalancer l’impact négatif du ralentissement économique sur la demande immobilière.»
«La première guerre transfrontalière en Europe depuis 80 ans a conduit à une hausse de l’inflation à des niveaux records », complète Hans Vrensen, Managing Director, Head of Research & Strategy Europe chez AEW. « Bien que nous estimions dans notre scénario central que le point haut d’inflation est désormais derrière nous, la conjoncture économique et l’augmentation des coûts de financement ont des répercussions négatives sur les marchés immobiliers. Les investisseurs sont désormais confrontés à un environnement de marché moins favorable. Cependant, nos analyses montrent qu’il existe toujours des opportunités pour les investisseurs positionnés sur les bons marchés et avec des capitaux prêts à être déployés. Les dernières années nous ont montré que l’environnement macroéconomique peut rapidement évoluer. Nos prévisions couvrent une période de cinq ans, mais nous pensons que les investisseurs doivent être mieux préparés dans un environnement actuel très volatil, la situation pouvant évoluer favorablement ou se détériorer.»